La CNCG publie son rapport d’activité sur les 10 ans des clubs de LFH.

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Pour la seconde fois depuis la création de la LFH en 2008 (voir première actualité du 16/12/2016), la Commission nationale de contrôle et de gestion (CNCG) publie un rapport sur l’évolution de la situation économique des clubs composant la division, avec notamment des données comparatives détaillées permettant d’illustrer l’énorme progression des clubs féminins de LFH.

 

Christian DUME, président de la CNCG depuis 2016 mais déjà membre depuis 1990, commente la démarche de sa commission, insiste sur les données les plus significatives et évoque les perspectives.

 

• Christian DUME, vous avez été élu président de la CNCG par le Conseil d’administration de la FFHandball lors des dernières élections d’octobre 2016. Pouvez-vous nous présenter un peu plus votre parcours et ce qui vous a conduit à devenir président de cette commission ?

 

J’ai commencé comme joueur, arbitre, président de club et très vite ai pris des responsabilité de bénévole et d’élu dans les instances départementales et régionales. Je fus par exemple trésorier de la ligue Ile de France pendant environ 20 ans sous la présidence de Jean Lafargue puis Jean Paul Demetz. C’est d’ailleurs ce dernier qui m’a proposé d’intégrer la commission chargée du contrôle de gestion des clubs d’élite.

Au retrait de Francis Serex de la présidence en 2016, ma connaissance du milieu associatif et mon parcours professionnel (chef de groupe en cabinet d’expertise-comptable) m’ont convaincu de poursuivre la mission en tant que président de la CNCG pour continuer à défendre l’idée principale de cette commission : à savoir l’équité sportive sans dérive financière.

Je suis aussi attaché à être entouré de profils différents parmi les membres de la commission : elle est composée d’environ une moitié encore en activité (dans des directions financières de grosses entreprises, des cabinets d’expertise-comptable ou de commissariat aux comptes) et d’une autre moitié constituée de bénévoles retraités disposant à la fois d’une expertise professionnelle et d’un parcours de dirigeant de clubs. Cette année, la commission a également accueilli deux nouveaux membres : un avocat et une contrôleuse des finances publiques.

 

• C’est le deuxième rapport que la CNCG publie (après celui de 2016) sur l’état des lieux économique des clubs de LFH. Pouvez-vous nous expliquer votre démarche et sur quels documents s’est appuyée la commission pour établir son rapport ?

 

Le rapport de 2016 était une première photographie de l’évolution de la situation économique des clubs à travers la comparaison des budgets prévisionnels des clubs.

Dans cette nouvelle édition, beaucoup plus détaillée, un gros travail a été fait pour analyser les comptes de résultat des clubs, c’est-à-dire les recettes et dépenses effectivement réalisées pendant les exercices comptables et validées par les commissaires aux comptes. En clair, les données de ce nouveau rapport sont plus fiables et surtout plus fines.

L’idée première de notre rapport est de faire ressortir les évolutions financières, le travail des clubs et de la LFH dans un contexte économique difficile pour faire avancer notre sport. Toutes les données chiffrées de ce rapport sont tirées des documents transmis par les clubs (comptes annuels certifiés par les commissaires aux comptes, différentes matrices remplies par les clubs, contrats de travail transmis).

Les documents dont la transmission est imposée réglementairement aux clubs permettent précisément à la CNCG de travailler à des rapports d’analyse complets, pour éclairer sur l’importante évolution du poids économique global du handball féminin de LFH depuis 10 ans.

Je remercie d’ailleurs les clubs de nous remplir le plus finement possible les différentes matrices (notamment par exemple la part budgétaire relevant du centre de formation, du médical, le détail des recettes de billetterie, … ) afin de nous permettre d’améliorer notre analyse.

L’un de nos objectifs vise également à offrir aux clubs eux-mêmes des documents d’analyse macro de l’environnement économique dans lequel ils évoluent, afin de leur offrir des leviers auprès de leurs prospects ou leurs partenaires.

 

• Le rapport met en lumière l’évolution des budgets des clubs depuis la création de la LFH, qui ont quasiment doublés en 10 ans. Comment expliquez-vous ce développement spectaculaire ?

 

Je pense que les résultats de nos équipes de France et ceux de nos clubs en compétitions internationales ont fait évoluer la vision que les partenaires publics et privés portent sur nos clubs, ce qui leur permet d’avoir un retour sur investissement, ne serait-ce qu’en terme d’image au regard des valeurs dégagées par le handball.

Spécifiquement, dans le handball féminin, les clubs de LFH bénéficient d’une dynamique très intéressante depuis 2016 : d’une part, les résultats de l’équipe de France sont exceptionnels (4 podiums en 3 ans) ; d’autre part, les clubs français ont su attiré une majorité des internationales françaises et des internationales étrangères de très haut niveau ; enfin, les modèles économiques des clubs se sont renforcés avec l’arrivée de partenaires économiques s’engageant sur du long terme et à des niveaux très importants.

Je crois aussi que l’arrivée de présidents de clubs issus du monde de l’entreprise a vraiment permis à certains clubs de franchir une étape dans leur fonctionnement interne.

Indéniablement, nous constatons que la structuration, au sein des clubs, des activités commerciales, de prospection marketing et de communication (avec le recrutement de salariés dédiés) est une des explications de la part que représentent désormais les recettes privées dans les budgets des clubs.

Nous savons aussi, au sein de la Commission, que les décisions parfois difficiles prises au long de ces 10 années (avec parfois des rétrogradations prononcées pour sanctionner des ruptures d’équité majeures), ont contribué à responsabiliser les clubs et assainir leur gestion financière.

 

• Quels sont aujourd’hui, pour vous et la commission, les leviers dont disposent les clubs pour poursuivre leur développement dans un contexte sportif de plus en plus concurrentiel ?

 

La continuité de leur travail rigoureux et l’accompagnement de la FFHandball et de la LFH.

Comme évoqué précédemment, la structuration de leurs activités marketing a déjà eu des effets majeurs ; l’un des prochains leviers concerne sans doute les prestations de relations publiques que les clubs sont en mesure de commercialiser autour des matchs et des événements (billetterie, offres privilégiées, etc), car culturellement plusieurs clubs sont encore confrontés aux difficultés de commercialiser l’accès à leurs rencontres.

Tout l’enjeu est de déconstruire la « culture de la gratuité » tout en fixant un juste prix pour chaque niveau de prestation.

En outre, le plus gros défi de tous les clubs sportifs est de pouvoir déconnecter au maximum les prévisions de recettes des résultats sportifs, pour limiter l’aléa budgétaire.

C’est en cela aussi que la gouvernance du club est primordiale : les dirigeants doivent avant tout être capables de garder « la tête froide » face aux résultats sportifs.

 

• A l’inverse, quels sont les risques identifiés par la CNCG dans la gestion ou le fonctionnement des clubs et sur lesquels s’exerce aujourd’hui prioritairement le contrôle de la commission ?

 

Je pense que le premier risque est de rentrer, entre clubs français, dans une bagarre de surenchère des salaires ou accessoires proposés par le club ou externalisés auprès de tiers, car les budgets des clubs de LFH sont trop hétérogènes (allant de 1 million d’€ à plus de 5 millions en 2019-20).

Notre rôle est d’ailleurs aussi d’offrir aux clubs et aux partenaires sociaux (syndicats des joueuses, des entraineurs) des éléments de travail et de comparaison concernant le poids de la masse salariale. C’est la raison pour laquelle depuis la saison dernière nous avons analysé les différents modes et montants de rémunération, y compris les éléments versés aux joueuses par des partenaires du club.

Les joueuses doivent bien mesurer les conséquences sur leurs prestations sociales lorsqu’une part substantielle de leur revenu est versée par un tiers différent du club (en contrat d’utilisation de l’image par exemple).

La pérennité du modèle économique du handball professionnel féminin implique tous les acteurs, chacun à son niveau de responsabilité.

Les clubs doivent rester toujours conscients qu’ils ne peuvent dépenser que les sommes dont ils disposent, pour ne pas jouer « à crédit » et fausser le championnat.

Les salariés (entraineurs et joueuses) doivent quant à eux être lucides sur l’environnement économique du handball féminin et ne pas mettre collectivement en danger l’équilibre financier des clubs, au risque de réduire le marché de l’emploi.

En ce sens, les accords sectoriels en cours de négociation entre les partenaires sociaux de LFH seront intéressants sur les équilibres trouvés.

La Commission va également analyser plus précisément le poids des commissions versées par les clubs aux agents sportifs, alors même que ces agents sont régulièrement mandatés par les athlètes eux-mêmes.

 

• Par ailleurs, l’assemblée générale de la Fédération a récemment adopté le cahier des charges minimum obligatoire pour tous les clubs de D2F dès la saison prochaine. Quels sont les enjeux de ce nouveau dispositif et quel va être le rôle de la CNCG ?

 

La mise en place de ce cahier des charges minimum pour l’ensemble des clubs de la division est le fruit d’un travail engagé il y a plus de 4 ans, avec tous les secteurs fédéraux concernés (DTN, médical, LFH) et bien sûr les clubs eux-mêmes. La priorité a d’ailleurs été mise sur les facteurs clés de structuration et de développement des clubs : le porteur du projet sportif (avec un entraineur salarié et diplômé -ou en formation), l’encadrement médical (avec un kiné ou médecin obligatoire sur tous les matchs à domicile), et bien sûr une situation financière saine.

L’enjeu premier est d’accompagner les clubs à se structurer et, peut-être à moyen terme, envisager une accession en LFH, division avec laquelle la marche est énorme. Le maitre mot est la recherche d’équité sportive entre les clubs participant à la deuxième division féminine.

Que toutes les dérives constatées par le passé (majoration des frais de déplacements, rémunérations non déclarées, absence de couverture sociale pour les joueuses, etc) et les risques sociaux, prudhommaux et fiscaux en découlant soient le plus limités possible, non seulement pour l’équité sportive mais aussi pour sécuriser les dirigeants et les présidents de clubs qui n’ont pas toujours conscience des conséquences queleur décisions peuvent entrainer sur la mise en cause de leur responsabilité personnelle.

Les clubs, même en D2F, sont en effet des employeurs avec tous les obligations et les risques qui en découlent.

Une part importante du dispositif vise aussi à ce que la CNCG soit au service des clubs dans leur recherche d’informations sur toutes les questions sociales et fiscales qu’ils peuvent rencontrer : la CNCG et le service juridique fédéral mettent déjà des fiches pratiques à disposition des clubs, nous allons en créer de nouvelles, sur les conditions d’assujettissement à TVA par exemple ou le recours au mécénat. Bien sûr, nous n’inventons pas le cadre réglementaire français, mais nous œuvrons pour informer et accompagner les dirigeants bénévoles des clubs dans la prise en compte de l’environnement complexe qui s’applique à eux en tant qu’employeurs.

 

• Enfin, la LFH a récemment conclu le premier partenariat titre du sport collectif féminin français, avec une nouvelle appellation du championnat qui devient la Ligue Butagaz Energie. Quel est le regard de la CNCG sur cette nouvelle étape franchie par l’institution LFH ?

 

Le nouveau partenariat conclu par la LFH permet de souligner le travail accompli depuis 10 ans par l’institution LFH, avec le soutien de la Fédération, pour développer la plus haute division féminine et en faire une ligue majeure dans le contexte européen du handball.

Le handball français s’affirme de nouveau, avec l’arrivée de ce partenaire titre, comme un pionnier dans les sports collectifs féminins français. La mise en place d’un accord sectoriel dans la division serait, là aussi, une première en France.

La présence de ce nouveau partenaire devrait permettre à nos clubs de profiter du travail de la LFH pour en tirer le meilleur profit au niveau régional, puisque Butagaz insiste sur sa volonté de déployer nombre d’actions dans chaque territoire pour soutenir les clubs de LFH.

Il y a 10 ans, la LFH ne disposait d’aucun partenaire spécifique au niveau national ; à l’orée de la saison 2019-20, le Ligue en compte désormais quatre (Butagaz, FDJ, Select et La Poste) et deux (sols sportifs et diffuseur) en cours de renouvellement, ce qui témoigne du travail accompli par la LFH et la Fédération.

 

Consulter le rapport de la CNCG : 

Rapport CNCG_10 ans LFH_final au 19-04-2019